Que vous viviez en pleine campagne avec des champs traités à proximité, en ville, ou encore en bord de route, une haie protectrice contre les pesticides ou autres pollutions, sera utile…
L’idée de cet article m’est venu suite à une question que m’a posée Laurent :

“Bonjour Gilles,
Je m’apprête à réaliser mon rêve ou … à faire une grosse bêtise.
J’ai trouvé un superbe terrain de 2’300m² près d’un village où je pourrais réaliser le jardin de mes rêves. Seul problème il est sur sa limite (largeur) ouest accolé à des champs. Il y 2-3 grands peupliers, un chemin entre le terrain et les champs mais bon je vais me prendre tous les pesticides et autres joies chimiques de mon voisin agriculteur. Et comme je viens de lire dans Le Monde un article qui dit qu’il faut au moins 100m entre le champ et la limite d’un terrain pour atténuer la concentration de ces doux produits super sains, j’hésite beaucoup. D’où ma question, comme j’ai de la place, auriez-vous des haies touffues magiques à conseiller pour absorber tous les produits chimiques (pauvre haie…) et ainsi protéger le reste du jardin ? Ou bien cela ne sert à rien car cela passera tout de même par dessus ou par ailleurs…
Merci beaucoup pour vos conseils et très bonne journée à vous
Laurent”
Soyons clairs : il n’y a pas de haie “magique”.
Une haie dense atténuera la pollution… mais elle ne l’éliminera pas…
L’eau, le sol, le vent sont des vecteurs possibles.
Et tout cela varie (l’orientation des vents diffère d’un jour à l’autre par exemple).
Mais, même si elle ne pourra jamais tout capter, une haie adaptée réduira quand même de façon considérable les pollutions arrivant dans votre jardin.
Commençons par voir quelques principes qui vous permettront de protéger au mieux votre terrain de pollutions environnantes (traitements chimiques, pollutions routières, rejets d’usines ou encore pollutions sonores diverses).
Quelques principes pour une haie protectrice
Privilégiez des espèces adaptées à votre région
Avant toute autre considération, je vous invite à privilégier des espèces adaptées à votre région.
Ce sont en effet ces espèces qui se développeront le mieux chez vous.
La nature acide ou calcaire du sol sera également un élément déterminant pour le choix des espèces à intégrer à votre haie.
Différentes strates de végétaux

On appelle “strates” les différentes hauteurs de végétation.
Nous avons ainsi des plantes basses (en général “herbacées), des arbustes et des arbres (devenant plus ou moins haut selon les espèces).
Diversifier les espèces à intégrer à une haie, en puisant dans les différentes strates, permettra non seulement de constituer une barrière à différentes hauteurs.
Mais cela jouera également un rôle fondamental en terme de biodiversité animale. Car chaque strate sert de refuge, ou de garde-manger, à des espèces animales différentes.
Une bonne épaisseur de haie

Plus la haie sera épaisse, meilleure sera la protection.
Vous pouvez par exemple faire une ligne d’arbre (pour la hauteur) le long du chemin. Puis, un peu en retrait, plantez des arbustes et des plantes herbacées. Ceci pour plus de largeur mais aussi pour densifier la végétation en bas de la haie.
Mais pensez également à y intégrer des plantes au feuillage persistant. Je pense par exemple au laurier, au cyprès ou autres conifères. Sans quoi votre barrière anti-pollution se dégarnira bien vite en hiver…
Intégrez des plantes “absorbantes”
Quelques plantes sont réputées plus “absorbantes de pollutions” que d’autres, comme notamment le cotoneaster franchetii, cité par de récentes études (voyez ici).

Le laurier-cerise fait également partie des espèces recommandées pour amoindrir la pollution (voyez ici). Mais attention… ses fruits, tentants, sont toxiques !
En complément d’une haie vivante, les bandes de bruyères seraient relativement efficaces pour limiter les projections d’herbicides… Tout au moins à hauteur de la bande.
Bon… Cette faculté à absorber des polluants est somme toute assez relative. Par exemple, le cotoneaster franchetii ne représente qu’un gain de 20% par rapport à d’autres plantes.
Et pour les raisons évoquées plus haut, il n’est donc pas question ici d’implanter une haie qui ne serait constituer que d’une seule de ces espèces.
Je vous recommande au contraire de diversifier au maximum en implantant des espèces variées (à feuillage caduc et à feuillage persistant), des végétaux de hauteurs différentes ainsi que des espèces « résistantes » à la pollution… Le tout s’étalant sur autant de largeur que possible.
Quelles espèces intégrer à une haie protectrice
Nous l’avons vu, le choix des espèces à intégrer à une haie dépendra de votre région (observez les essences qui y sont présentes, et n’hésitez pas à demander conseil à votre pépiniériste) mais aussi de la texture et du PH de votre terre (je présente, dans Mon Potager au Naturel, des tests simples à effectuer pour en déterminer les grandes caractéristiques).
Voici un document qui, bien que plus particulièrement destiné aux agriculteurs du Cantal, vous fournira une multitude d’indications très utiles pour faire vos choix et pour planter votre haie :
haies-champêtres-cantal
Vos questions et commentaires sont bienvenus ci-dessous…
Bonjour à tous
Je ne suis pas agricultrice, mais je vis en milieu rural depuis 78 ans, ce qui me donne un certain recul!
Arrêtez par pitié de tirer sur les agriculteurs, ils vous, nous, nourrissent car peu d’entre nous vivent en complète autarcie. Ce n’est pas par plaisir qu’ils se servent de ces produits mais pour avoir un rendement qui permette de nourrir tout le monde. S’il n’y avait pas eu ces produits au sortir de la guerre, (et là on ne connaissait pas encore parfaitement leur nocivité)il n’y aurait pas eu la production nécessaire à la population.
Je suppose que tout le monde est conscient qu’on ne jardine pas des hectares de pommes de terre ou de fruitiers comme dans son joli petit jardin.
j’ajouterai deux petites chose: que les jeunes agriculteurs font des efforts énormes et payants pour améliorer leurs pratiques et que: peut-être c’est cette protection de tous ces pesticides autour des petits jardins que nous bichonnons qui permet de maintenir loin les ‘pestes’ qui ne demandent qu’à surgir (exemple la covid pour les humains, le phylloxera autrefois pour la vigne), et qui piétinent à la porte de nos jardins.
Joyeux Noël, restez bien au chaud et admirez les paysages de l’hiver.
Bonjour Marie-Claude,
Jamais je ne “tire sur les agriculteurs”, trop conscient des difficultés et du mal-être du monde agricole…
Je ne fais qu’alerter sur les conséquences de l’utilisation de produits chimiques (en premier lieu pour les agriculteurs eux-mêmes, les premiers touchés…).
Mais vous avez raison : ce sont eux qui nous nourrissent…
Mais pour info, on peut nourrir la population sans utiliser de produits chimiques.
Des agriculteurs bios cultivent aussi des hectares, avec des rendements proches (voire parfois supérieurs à l’agriculture chimique).
Et surtout, des fermes à taille humaine sont tout aussi viables que de grosses fermes. Plutôt que de chercher à s’agrandir à tout prix (pour rembourser des emprunts…), les agriculteurs d’aujourd’hui feraient bien d’y réfléchir (et d’ailleurs ils sont chaque jour un peu plus à le faire et à se convertir au bio…).
Concernant le Covid (et d’autres virus qui ne tarderont pas à apparaitre), c’est justement la perte de biodiversité (causée notamment par les pesticides, mais aussi la déforestation) qui est en cause. Ce n’est pas moi qui le dit, mais les scientifiques (voyez par exemple ici : https://www.fondationbiodiversite.fr/biodiversite-et-epidemies/).
Il en va de même pour les ravageurs des jardins. Comme je le répète souvent, en détruisant une population animale, nous créons de nouveaux déséquilibres, entrainant des proliférations incontrôlables, et donc d’autres invasions et dégâts… Il faut alors traiter à nouveau contre les nouveaux ravageurs… C’est un cercle vicieux sans fin…
Pour finir, je dirais que si nous voulons que nos enfants et petit-enfants puissent admirer eux-aussi les paysages de l’hiver, cesser ces pratiques destructrices est plus que jamais un impératif.
Cordialement,
Gilles
Bj. Gille, Moi j’ai un triple problème; Je suis a coté d’une route très passante et d’on la pollution n’est pas des moindres car il s’y rajoute le bruit; Toutes les terres autour sont des cultures de pommiers très très traitées; et ma terre est une ancienne fabrique de tuiles, donc très argileuse. Depuis 5 ans je m’échine dessus sans résultat, j’en suis a renoncer et a la laisser en friche.
Bonjour Gilles,
Voici un document (fichier Pdf dont je donne le lien ci-dessous) dans lequel on parle des ennemis naturels ravageurs des cultures; je sais que cela semble ne pas coïncider avec ce thème concernant les haies naturels, pourtant ces biotopes se retrouvent dans ces mêmes haies.
Bien cordialement,
Dominique W.
https://ecomestible.com/wp-content/uploads/2021/07/Ecomestible-Connaitre-les-ennemis-naturels-des-insectes-ravageurs-et-favoriser-leur-activite-dans-les-cultures-maraicheres.pdf
Merci pour ce document très intéressant Dominique
Amicalement,
Gilles
Bonjour,
J’habite en Belgique en milieu rural et donc forte densité de terres agricoles cultivées en conventionnel.
Lors de mon installation en maraîchage, j’ai été confronté à ce problème. Côté gauche et droit de mon terrain : pas de soucis des terrains bien fournis en arbre. Par contre au fond complètement ouvert sur 75m avec des champs cultivés à perte de vue.
Pour m’en prémunir au maximum, j’ai mis en place 3 systèmes:
– Un voile artificielle brise-vent de 2m de haut à 1 m du champ
– Ensuite plantation d’une double haie en quinconce tous les mètres. Tous les 5 arbres j’ai planté un arbre haute-tige et entre-deux des arbustes. L’idée étant de créer un mur végétal très dense et très haut à terme environ 15m. J’ai planté uniquement des espèces indigènes parfaitement adaptées à ma région.
– Recul de 8-10m entre la haie et mes premières cultures.
Après 4 ans de mise en place, j’avais une haie bien dense qui dépassait déjà bien le voile brise-vent.
Je ne vois d’ailleurs plus le voile brise-vent au travers de la haie.
C’est devenu une belle bande boisée, refuge de nombreux oiseaux et insectes. Les faisans aiment s’y cacher et faire leur nid 🙂
Voilà ça me semble être une bonne solution. Ca demande du temps et de l’argent (le voile brise-vent ainsi que les piquets en châtaigner sont assez coûteux) mais on ne le fait qu’une seule fois.
Bonne fin d’année à vous tous.
Merci pour ton partage Jeff.
Amitiés,
Gilles