Fiche Culturale d’une plante de couvert: Le Sorgho au Jardin Bio

Bonjour à tous !

Je reprends le fil de la série que j’avais proposée à Gilles sur les plantes à utiliser en couverts végétaux, ou encore « engrais vert ».

J’ai choisi cette semaine de vous parler d’une plante que j’utilise beaucoup, au moins cette année, pour les nombreuses caractéristiques intéressantes et bienfaits qu’elle peut exprimer au potager naturel : le Sorgho.

Présentation du Sorgho

Botaniquement et historiquement parlant, le Sorgho se situe comme cela :

Le Sorgho est une graminée herbacée pérenne, mais la plupart du temps conduite comme une annuelle (a fortiori en climat tempéré).

Au plan mondial, bien que ce ne soit à mon avis pas le cas en Europe (il est cependant de plus en plus fréquent de croiser des champs de Sorgho au sud de la Loire, en région Aquitaine par exemple), c’est la cinquième « céréale ». Il est notamment bien plus fréquent de le croiser en climat aride. Car, comme je le redirai un peu plus bas, le Sorgho a cet avantage sur le Maïs qu’il a besoin de beaucoup moins d’eau. En France, il est intéressant parce que, comme culture fourragère par exemple, il n’a pas à être irrigué.

Les Intérêts du Sorgho

Au jardin bio, le Sorgho montre une liste assez impressionnante d’avantages :

  • En premier lieu, sa biomasse. Elle est plus importante que celle du maïs, son potentiel de masse carbone est plus important. Donc, conformément et en toute logique avec ce dont je vous fais part depuis quelques mois maintenant, davantage de carbone, c’est davantage de fertilité. Mais avant tout, c’est plus de vie du sol, sur toute la chaîne, de la rhizodéposition à la récolte et au fauchage. Carbone = vie donc  carbone = NPK biologique (entre autres, puisque les suites d’un retour de carbone au sol ne se résument pas à n’apporter que des NPK). En conditions favorables, le Sorgho peut produire à lui seul jusqu’à 25 tonnes de matière sèche à l’hectare (pas sous nos latitudes cependant). C’est à peu près le seuil nécessaire à l’auto-fertilité, et ce, en une seule culture, sans apport de paille, ni BRF, ni foin ! Selon Claude Bourguignon, c’est une plante qui, au Brésil, peut produire 4,50 m de végétation en soixante jours… Ce qui fait 95 tonnes de matière organique à l’hectare (entre 20 et 25 tonnes de matière sèche) !!!
  • Son pouvoir de « désherbage ». Le Sorgho est fortement concurrentiel avec les spontanées, à biomasse nettement plus faible. Ce, principalement du fait du développement de son système racinaire, et de sa vigueur qui lui permet d’aller chercher l’énergie solaire très haut. Ses racines sont à la fois très fasciculées et profondes. Mais le Sorgho possède également une puissante racine pivotante. L’idéal !
  • Il peut être, pour ceux d’entre nous qui sont dans ce cas, valorisé en alimentation animale.
  • La graine de Sorgho, une fois correctement séchée, est tout à fait comestible pour l’homme, voire très bénéfique. Elle est très utilisée, voire très prisée en milieux arides, de l’Afrique à la Chine. Les utilisations les plus courantes en nutrition humaine sont les farines (délicieuses !), les sirops (le Sorgho est très sucré, très appétant et nutritif), les bouillies et purées, et les fermentations (bières et alcools). Il est donc possible de coupler, en une seule culture d’été, un engrais vert de toute première qualité avec une production vivrière également très qualitative. À tout point de vue, en nutrition humaine, c’est meilleur que le maïs. C’est plus goûteux, c’est plus nutritif, et c’est bien plus digeste.
  • Le Sorgho peut très bien être utilisé dans les cultures associées de type « Milpa », où sous nos latitudes, il remplacera avec avantage le maïs dans le tuteurage du haricot à rames. C’est le cas chez moi. Vu la levée impressionnante du Sorgho lorsque les jours rallongent et se réchauffent, je ne regrette pas mon choix !
  • Tout comme le Maïs dont il est un cousin, le Sorgho est une plante dont les racines sont très fortement mycorhizées. D’où mon idée de le semer sous litière très ligneuse, en présence d’humidité, d’engrais organiques et de fixateurs d’azote (trèfle en couvre-sol). C’est triple bénéfice : sa croissance est démultipliée, d’où un retour décuplé de masse carbone, qui va enclencher le cercle vertueux de l’humification ; La mycorhization qu’il induit va profiter aux cultures qui vont pousser en même temps que lui (typiquement, une grimpante et un couvre-sol) ; les champignons mycorhiziens, une fois sur place, vont ensuite coloniser l’ensemble de la litière, et proliférer à l’automne avec le retour de l’humidité. C’est un avantage de premier ordre pour toutes les cultures suivantes.
  • Sa paille est très allélopathique, bien plus que celle du maïs. Elle engendrera donc d’elle-même une meilleure gestion des spontanées et de l’enherbement d’une manière générale, pour les cultures suivantes.
  • Ses racines sont fortes et profondes, d’où une bien moindre souffrance à la sécheresse que la plupart de ses cousins. D’une pierre, deux coups : moins d’arrosage, et une fissuration et un ameublissement du sol optimaux. C’est d’autant plus vrai dans un sol très vivant, où ses racines prendront beaucoup de plaisir et de facilité à descendre via les galeries des vers de terre, où elles vont en plus bénéficier des nutriments laissés par les vers sur les parois des galeries via leur mucus, et notamment l’azote.
  • La paille de Sorgho, du fait de sa constitution, de sa taille, et de sa qualité, est un refuge de premier ordre pour l’ensemble de la faune du sol. Les vers de terre y trouvent un refuge de qualité, surtout les épigés qui sont régulièrement décimés par leur proximité avec la surface qui les expose aux prédateurs.
  • Le Sorgho est fauché à l’automne. Et il y a fort à parier que l’arrivée brusque d’une telle quantité de biomasse directement au sol ait un effet très régulateur sur les détritivores, dans le genre de nos fameuses et chères limaces.

Les Inconvénients du Sorgho

Son désavantage majeur, c’est que c’est une culture d’été, c’est-à-dire qu’il poussera au moment où nous avons le plus besoin de l’espace de nos planches de culture… Mais encore une fois, il faut l’associer à d’autres productions. L’exemple typique est celui des cultures grimpantes ou hautes, comme les tomates, les haricots à rames, les melons à palisser, les concombres, les aubergines

Un autre désavantage possible, selon vos goûts et vos choix, c’est le « look ».

À maturité, et tout au long de sa croissance, c’est une vraie forêt vierge.

Et une fois sur le sol, c’est 15 cm de litière, aux bas-maux, et qui mettra tout de même un certain temps à se décomposer.

Utilisé en couvert, en tuteur, en culture vivrière principale, il est de toute façon intéressant de le fertiliser, pour maximiser encore l’ensemble des bienfaits qu’il nous apporte.

Utilisations du Sorgho

Voici les utilisations que j’en ai :

  • En mélange dans le couvert sur une nouvelle parcelle où seront disposées les serres au printemps prochain.
  • En tuteurage de tout ce qui en a besoin. Tous mes tuteurs seront des tuteurs vivants. J’ai quand même utilisé aussi du maïs pour la diversité des cultures.
  • En production vivrière.
  • En ombrière naturelle pour tout ce qui préfère l’ombre. J’en ai mis quelques pieds dans mes planches de mesclun et de laitues à couper.

Où se procurer du Sorgho, et comment le conduire ?

L’ensemble des semenciers dignes de ce nom, très célèbres au jardin bio, disposent de Sorgho. Mais le plus difficile, c’est d’en trouver en petite quantité. Je me permets de placer ici l’excellence, la disponibilité et la gentillesse de l’équipe des Semences de Provence, qui m’en ont envoyé – gracieusement – 3 kg !!!

Pour ce qui est des quelques dizaines de mètres carrées que nous avons d’ordinaire à semer, la célèbre association de protection de la biodiversité et des semences paysannes que je n’ai plus à présenter ici dispose d’un catalogue de Sorgho assez impressionnant et très approprié à la nutrition humaine.

La conduite du Sorgho est assez simple. Mais les pré-requis sont en revanche non négociables… Il lui faut un sol chaud, humifère, profond, et riche.

N’hésitez pas à le fertiliser, même légèrement, pour le départ. Ensuite, il devra développer sa symbiose mycorhizienne. Mais si vous voyez que « ça rame », et que vous voulez quand même un maximum de biomasse, apportez du compost, voire de l’azote organique rapidement minéralisable (sang séché et corne broyée). En dernier recours, utilisez du sulfate de potasse minérale type Patentkali, a fortiori à la fructification. Les purins azotés et potassiques, types ortie et consoude, sont très appropriés, tous les 10 jours environ. Les mêmes plantes en mulch sont tout aussi indiquées, et sans doute même meilleures sous cette forme pour une fertilisation de long terme.

Au nord de la Loire, il est inutile de semer avant le 15 mai, et encore, sous abri si le climat ne s’y prête pas. Pour une utilisation en tuteur, semez sous châssis ou sous serre, en godets, des poquets de 3 graines. Ne conserver que la plantule la plus vigoureuse de chaque godet après trois semaines de levée. Repiquer au 15 juin, pas avant. C’est une plante TROPICALE !

Bien que ce soient sans doute les meilleures conditions climatiques qu’il puisse rencontrer, je déconseille le Sorgho sous serre… Justement du fait de son très fort développement. Ou alors, choisissez des variétés à croissance plus faible. Sinon, en fortes chaleurs et en jours longs, c’est à coup sûr que votre bâche finira crevée (la variété que j’ai semée en tuteurs et en couverts est la Biomass 140 de chez Semences de Provence, c’est un Sorgho à biomasse à fins de méthanisation qui peut atteindre 4,5 m de végétation en moins de trois mois, en climat adapté).

Il est possible de semer jusque fin juin au moins, en semis direct.

Bonnes expériences, et avec mes amitiés,

Benoît

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