Comment démarrer un potager en permaculture ?
Voilà une question que se pose tout jardinier débutant !
Bien souvent, il a déjà appris pas mal de choses sur les cultures.
Mais quand vient le moment de démarrer, il est un peu perdu et se pose alors de nombreuses questions :
- Par où dois-je commencer ?
- Comment me débarrasser des herbes ?
- Dois-je retourner la terre alors que l’on me conseille aujourd’hui de ne pas le faire ?
- Mais si je ne la retourne pas, comment vais-je pouvoir effectuer mes semis ?
Bref, autant de questions auxquelles nous allons tenter aujourd’hui de répondre en présentant 4 méthodes envisageables pour créer un potager en permaculture dans de bonnes conditions.
Méthode 1 : sans travail du sol
Créer un potager en permaculture sans travailler la terre est la meilleure approche, tout au moins en théorie.
Une couverture permanente du sol est en effet idéal (voyez l’avertissement en fin de présentation de cette méthode, car les choses ne sont pas toujours aussi simples et évidentes que ce que voudraient vous faire croire certains…) pour ne pas chambouler le sol et donc respecter sa structure ainsi que les différentes formes de vie qui s’y trouvent.
Quand démarrer un potager sans travail du sol ?
Plus que la période elle-même, l’état de la terre est une donnée essentielle dans la création d’un potager sans travail du sol :
- La terre doit être humide (mais pas non plus gorgée d’eau) ;
- Elle ne doit pas être froide ;
- Elle ne doit pas être trop tassée.
Si l’une ou l’autre de ces conditions venait à manquer, la vie ne pourrait pas s’installer correctement dans le sol. Et la bonne évolution du processus en serait d’entrée fortement compromise.
Pour répondre au mieux à ces conditions, mais aussi afin de laisser du temps aux vers de terre et autres organismes vivants du sol pour effectuer le travail (car ce sont bien eux qui vont travailler pour vous !), la période idéale se situe en fin d’été (après des pluies) ou en début d’automne (quand le sol est humide, mais encore relativement chaud).
L’hiver est à éviter (la terre est alors trop froide pour que la vie puisse s’y développer correctement).
Vous pouvez éventuellement épandre votre paillage épais au printemps (1)… Mais ne vous attendez pas à pouvoir y implanter directement des cultures. Il faut au mieux plusieurs mois pour que la terre soit naturellement aérée, ameublie et enrichie par un paillage.
Comment créer un potager sans travail du sol ?
Concrètement, il est très simple de démarrer un potager sans travailler la terre.
Vous allez simplement couvrir le sol avec un paillage épais.
L’objectif est double :
- Étouffer la végétation spontanée et l’empêcher ainsi de se développer au printemps suivant ;
- Rendre la terre meuble et directement “praticable” au printemps suivants (ce sont les vers de terre et autres organismes vivants dans le sol qui vont se charger de ce travail d’aération et d’ameublissement du sol indispensable à la mise en place de cultures légumières).
Voici concrètement comment procéder :
- Commencez par couper l’herbe au plus bas. Puis laissez-la commencer à se décomposer avant d’épandre votre couverture du sol :
- Déposez des cartons sur le sol (Cette phase est facultative, mais elle empêchera d’éventuelles adventices coriaces, comme le liseron ou le rumex par exemple, de se développer et de traverser le paillage… Enlevez le scotch et les étiquettes, mais sachez que les normes européennes imposent aujourd’hui l’utilisation de colles et d’encres d’origine végétale pour la fabrication des cartons) ;
- Épandez éventuellement (ce n’est pas obligatoire, mais ça favorisera le développement de la vie au niveau du sol) du fumier frais ou en cours de décomposition, ou du compost ;
- Épandez une couche épaisse (au moins une vingtaine de cm pour pouvoir étouffer les herbes spontanées) de paille, de vieux foin, d’herbes coupées, de BRF ou autres matériaux végétaux. L’idéal, en particulier si la terre est tassée, est d’alterner plusieurs couches de ces divers matériaux.
Vous n’aurez plus alors qu’à écarter le paillage au printemps suivant pour semer ou planter.
Si tout s’est bien passé…
Avertissement important : cette façon de procéder peut être problématique sur terre lourde (risque d’asphyxie) ou fortement tassée, ou encore si elle est mise en œuvre au mauvais moment (sol sec ou froid).
Dans l’une ou l’autre de ces situations, il est je pense préférable d’envisager l’une des méthodes suivantes, sachant que si vous travaillez la terre, vous pourrez compenser les quelques dégâts (en réalité très relatifs, si vous travaillez avec les outils écologiques que je vais vous recommander) occasionnés par le travail du sol, par des apports de matières organiques appropriées (en fonction du type de sol).
(1) Méthode alternative pour créer un potager sans travail du sol au printemps (mais qui requiert des quantités énormes de compost) : “the no-dig method” de Charles Dowding
Méthode 2 : en travaillant la terre
Quand commencer un potager avec travail du sol ?
Dans les sols lourds, travaillez la terre à l’automne et cultivez de suite un engrais vert afin d’ameublir et d’aérer la terre.
Dans les sols sableux, dépourvus ou contenant très peu d’argile, il est préférable d’attendre le printemps pour débuter les travaux.
Comment créer un potager avec travail du sol ?
Si possible, travaillez à la Grelinette. Cet outil désormais célèbre permet d’affiner la terre sans la retourner. Avec la Grelinette, on travaille toujours à reculons, en se servant de son poids pour enfoncer l’outil. Puis on opère simplement un petit mouvement rotatif pour ameublir la terre…
Bon, il y a aujourd’hui encore mieux : la Campagnole !
Que ce soit avec l’un ou l’autre de ces outils écologiques, travaillez une première fois, sans trop enfoncer les dents. Le but étant ici de simplement déraciner les adventices. Puis laissez-les sécher ou enlevez-les pour les mettre au compost (cette solution est préférable si la période est pluvieuse, sans quoi les adventices risquent de redémarrer).
Travaillez à nouveau en perpendiculaire (pour la Grelinette) du premier passage, mais cette fois en enfonçant complètement les dents.
Mettez ensuite du compost et incorporez-le avec un nouveau passage, qui devrait normalement avoir permis un ameublissement suffisant du sol.
Pour une surface plus importante, bien que peu compatible avec un potager naturel, le travail au motoculteur (de préférence avec un cultivateur plutôt qu’avec un outil rotatif, également pour éviter de retourner la terre) ou à la motobineuse (mais vous risquez alors de multiplier les bouts de racines d’herbes indésirables) peut s’avérer nécessaire.
Plusieurs passages espacés dans le temps permettront d’ameublir correctement le sol et de le débarrasser d’une grande partie de la végétation spontanée.
Il sera ensuite impératif de nourrir votre terre par des apports de matières organiques adaptés.
Méthode 3 : en constituant des buttes vivantes (buttes lasagnes)
La constitution de buttes vivantes, ou buttes en permaculture, est une troisième alternative possible pour démarrer un potager naturellement.
J’aurais pu classer cette alternative avec la méthode 1, car là non plus, vous ne travaillerez pas la terre.
Toutefois, compte tenu du travail considérable pour l’élaboration des buttes, mais aussi de la quantité importante de matériaux nécessaires à leur constitution, cette technique est à mon sens à réserver aux cas désespérés : sol très peu épais (à fleur de roche), totalement pollué, ou encore argileux à l’extrême (impossible à cultiver)…
Quand démarrer un potager en lasagnes ?
Pour des plantations, les lasagnes peuvent être constituées en automne, en hiver, et même jusqu’au printemps (juste avant de planter).
Pour des semis, je pense qu’il est préférable de préparer la butte à l’automne précédent, afin que celle-ci puisse offrir un substrat de culture déjà suffisamment décomposé (voyez l’article sur les buttes vivantes pour plus de précisions sur l’utilisation des buttes).
Comment créer un potager en lasagnes ?
- Placez des cartons à même le sol, en les croisant les uns sur les autres (ceci afin d’étouffer les herbes) ;
- Couvrez-les ensuite de branchages ;
- Intégrez ensuite des copeaux de bois en cours de décomposition ;
- Recouvrez d’une fine couche de matériaux verts (herbes fraîchement coupées, déchets du jardin, jeunes rameaux feuillus broyés) ;
- Amenez du compost en décomposition (à l’automne) ou mûr (au printemps) par dessus.
Vous aurez ainsi constitué une butte de culture particulièrement riche en élément nutritif.
Ce n’est ici qu’un exemple de butte vivante… Il y a d’autres façons de faire (par exemple avec du bois enterré). Mais je ne présente ici que des méthodes que j’ai moi-même mises en œuvre… Mais rien ne vous empêche de voir également ailleurs.
Méthode 4 : en bâchant
Cette dernière méthode pour démarrer un potager ne satisfera pas les plus écologistes d’entre vous.
Elle n’en demeure pas moins simple et efficace.
Quand démarrer un potager en bâchant ?
Comme pour la méthode sans travail du sol, la couverture, en l’occurrence une bâche, doit être effectuée lorsque le sol est humide et suffisamment chaud.
En vue de cultiver au printemps suivant, la fin de l’été, après des pluies, et le début de l’automne sont les meilleures périodes.
Comment commencer un potager en bâchant ?
Cette méthode consiste simplement à poser une bâche noire sur la parcelle que vous souhaitez mettre en culture.
Lestez bien les bords afin que la bâche ne s’envole pas.
Il faut ensuite la laisser en place jusqu’à ce que toutes les herbes disparaissent en dessous. Ce qui prendra de 2 à 6 mois selon la saison et les conditions météorologiques.
Le résultat est parfait pour démarrer de nouvelles cultures : une terre souple, réchauffée, sans herbes indésirables, grouillante de vie. Contrairement à ce que disent certains, il y a en effet de la vie sous une bâche, à conditions de la poser au bon moment.
- Si vous voulez semer, épandez du compost puis ameublissez la terre à la Grelinette ou à la Campagnole, ou avec une simple griffe si le sol est bien meuble ;
- Si vous voulez planter : creuser votre trou de plantation et incorporez-y du compost bien mûr.
Paillez ensuite (cette fois avec des matériaux d’origine végétale).
La bâche pourra ensuite être réutilisée pour une culture de melons par exemple. Ce qui est d’ailleurs un bon moyen pour réussir cette culture délicate.
Faites maintenant votre choix pour commencer votre potager en permaculture
Réfléchissez à votre situation…
Le premier point à considérer, ce sont les conditions telles que présentées dans cet article :
- À quelle période sommes-nous ?
- Dans quel état est votre terre ? Tassée ou non ? Humide ou non ?
- La terre est-elle suffisamment profonde (30 cm de terre sont un minimum pour des cultures potagères) pour y cultiver directement ?
- Souhaitez-vous cultiver rapidement, ou bien prendre votre temps est tout à fait envisageable ?
Les réponses à ces quelques questions devraient vous permettre un premier tri parmi les 4 méthodes présentées ici pour démarrer un potager de façon cohérente et réaliste et en accord avec votre sensibilité (écoutez-vous)…
Mais en fait, vous n’êtes pas obligé(e) de choisir…
Testez différentes approches !
À mon avis, le mieux est même plutôt de mettre en œuvre plusieurs techniques les unes à côté des autres, sur de petites surfaces, ceci pour diverses raisons :
- Si l’une des méthodes testées ne fonctionne pas comme vous l’aviez envisagée, une autre vous donnera alors sans doute satisfaction ;
- Vous pourrez comparer les différentes méthodes et voir ainsi laquelle (ou lesquelles) est la plus adaptée à vos conditions de sol ou de climat, tout en répondant à vos aspirations ;
- Mieux vaut se faire la main sur une petite surface que de se retrouver complètement débordé(e) par une superficie de culture importante et difficile à gérer quand on manque encore ; d’expérience… Vous augmenterez ensuite progressivement la taille de votre potager, en appliquant l’approche qui vous aura le plus convaincu(e).
Quelques articles complémentaires pour bien démarrer
- Pourquoi créer un potager bio ?
- Pourquoi et comment créer un potager en permaculture en automne ?
- Connaître sol : déterminez simplement la texture et le PH de votre terre
- La couverture permanente du sol
- Amendements et engrais, ne confondez pas !
- Au potager bio, laissons la nature aux commandes
- Planifiez vos cultures
- Quand semer vos légumes ?
- Surfaces de culture au potager
- Echelonnez vos cultures
- Associations de plantes au potager
- Classification des légumes
J’espère que cet article vous aura permis de choisir votre méthode, ou vos méthodes, pour démarrer un potager. Ou au moins à débroussailler un peu le terrain dans votre tête.
Sachez que je peux vous aider, à travers la prestation d’accompagnement personnalisé (incluant mon guide pratique Mon Potager au Naturel), à faire les choix adaptés à vos conditions de culture et à démarrer un jardin potager dans les meilleures dispositions.
Vous préférez apprendre sur le tas ? Je vous recommande le stage proposé par Terre Vivante en Isère et intitulé “Cette année, je démarre un potager bio”.
Vos questions (mais ne me demandez pas une étude complète de votre situation…) et commentaires sont bienvenus ci-dessous.